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mardi 25 juillet 2017

AU MISTRAL, poème de Nietzche

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Vent Mistral, chasseur de nuages,
Mort du chagrin, pureté du ciel,
Que je t'aime, ô toi qui mugis !
Ne sommes-nous pas tous deux du même sein
Les prémices prédestinées
Au même sort éternellement ?

Sur les chemins glissants des rochers
J'accours dansant à ta rencontre,
Dansant dès que tu siffles et chantes,
Toi qui, sans vaisseau ni rame,
De la liberté le frère le plus libre,
T'élances par-delà les mers sauvages.

A peine éveillé, à ton appel
J'ai bondi aux marches des falaises
Aux parois jaunes, sur la mer.
Salut ! Déjà tu descendais, pareil
Aux claires cascades diamantines,
Victorieux du haut des montagnes.

J'ai vu tes coursiers au galop
Fouler l'aire unie des cieux,
J'ai vu le char qui te porte,
Vu même s'avancer ta main
Quand sur le dos des coursiers
Elle brandit le fouet comme la foudre.

Je t'ai vu sauter hors du char
Pour t'élancer plus rapide vers le bas,
Je t'ai vu flèche aiguë
Verticalement fendre l'abîme, _
Tel le rayon d'or perce les roses
Des premières lueurs de l'aurore.

Danse dès lors sur mille dos
Dos des vagues, astuces de vagues _
Vive qui crée de nouvelles danses !
Dansons donc de mille manières,
Livre _ soit nommé notre art !
Gai _ nommé notre savoir !

Dérobons à chaque plante
Une fleur pour notre gloire,
Et deux feuilles pour notre couronne.
Dansons comme les troubadours
Parmi les saints et les putains
La danse entre Dieu et le monde !

Qui n'entre dans la danse des vents,
Qui vit enveloppé de bandelettes,
Momifié, ou vieux cul-de-jatte,
Qui se comporte en hypocrite,
En Philistin, en oie de vertu :
Ouste ! hors de notre paradis !

Soulevons la poussière des routes
Au nez de tous les souffreteux
Effarouchons la race débile !
De ses regards apeurés,
De l'haleine des poitrines essoufflées,
Purifions toutes la côte !

Chassons les ternisseurs du Ciel
Broyeurs de noir, amants des nuées,
Clarifions le royaumes des Cieux !
Mugissons avec toi
O le plus libre des esprits libres,
Telle la tempête mugit ma félicité

Pour qu'immortelle soit la mémoire
De pareille félicité, emportes-en le témoignage
Emporte là-haut cette couronne
Lance la plus haut, plus loin encore,
Sur les degrés du ciel, vole,
Va-t'en la suspendre aux astres !


Friedrich NIETZSCHE
Le Gai Savoir



Mais comme ce vent est mauvais
Quand il souffle sur les flammes
Et comme la Provence le hait
Quand il brûle ainsi sa verte âme

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