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lundi 2 novembre 2015

Et le marché créa l'Avocat.

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Le nombre d’avocats a augmenté de plus de 40 % en dix ans, induisant un débat sur la possibilité de la profession d’absorber ce nombre exponentiel.
Dans l’incessant déroulé des messages Twitter, celui d’un ancien président de l’ACE suggérant qu’il n’y avait pas trop d’avocats, mais inadaptation de ceux-ci au marché.
Pas les marchés des villages où la ménagère de plus de 50 ans s’en va acquérir ses choux et poireaux.
Mais l’adaptation à la réalité du monde économique.
Cela pose de multiples questions.
D’abord le taux d’augmentation est effectivement le même sur tout le territoire, semble-t-il.
Si l’on peut considérer un besoin de droit de la part des entreprises, la situation est différente selon les bassins d’activité.
Paris la toute belle n’est pas Marseille.
Les nouveaux marchés du droit que l’on peut imaginer seront peut-être réalité d’ici 10 ou 20 ans, mais en attendant, c’est la problématique des fins de mois qui est présente.
Car dans les territoires sinistrés, c’est de cela qu’il peut s’agir.
Mais, extrapolons.
Le rôle de l’avocat était, autrefois, de dire la parole de celui qui s’opposait et sa robe issue du clergé, ce rapport distancié à l’honoraire, autrefois banni, participait d’un temps où régnait la sacralité.
L’Avocat n’écrivait pas, il parlait.
Cela reste un peu dans les gènes de l’avocat judiciaire, dans sa façon de penser.
Mais le droit est aussi devenu une marchandise et l’Avocat dans le monde de l’entreprise (bientôt en) n’est pas tant celui qui s’oppose que celui qui facilite les décisions prises.
C’est un processus intellectuellement différent.
Quelque part la profession d’avocat est devenue un peu schizophrène.
Mais alors les marchés ?
On sait que l’entreprise aujourd’hui ne crée pas des objets dont le consommateur a besoin mais crée des objets dont elle  va convaincre le consommateur qu’il en a besoin, même si ce n’est nullement le cas.
A-t-on besoin du dernier iPhone ?
Là où l’on parlait autrefois du verbe créateur, c’est aujourd’hui l’entreprise créatrice qui règne.
Si l’on prend l’industrie pharmaceutique, on doit constater que celle-ci va jusqu’à créer des maladies.
Le taux de cholestérol qu’il ne faut pas dépasser est la conséquence de la création de médicaments, pas la cause.
Il en est ainsi pour toutes sortes de nouvelles maladies.
Peut-être de la fameuse hyperactivité des enfants ; quel médicament ?
Le consommateur est malade parce que l’entreprise l’a décidé pour vendre son médicament.
Ne voit-on pas aujourd’hui Google s’intéresser à la santé et vouloir créer le diagnostic prédictif ?
Ça fait peur !
Alors l’avocat.
Il est permis de se poser la question de savoir s’il n’en est pas de même pour la profession d’avocat.
Bien sûr il y a les nécessités de l’évolution économique qui contraignent cette vieille dame que la profession à se bouger un peu les fesses dans son comportement ; c’est vrai.
Mais quel avocat veut le marché ?
On devine qu’il ne veut pas l’avocat d’antan, celui qui s’oppose.
Il veut celui qui met en forme ce qui a été décidé, l’exécutant.
Il peut vouloir aussi un avocat dévalorisé qui peut alors être utilisé, par exemple pour l’aide juridictionnelle au sein de structures dédiées qui pourraient satisfaire des intérêts financiers puissants.
Quand on dit que les avocats ne sont pas adaptés au marché, eux dont la culture restent marquée de la tradition sacramentelle, c’est-à-dire d’un rôle de la profession allant au-delà du matériel et de la marchandisation ; cela peut vouloir dire aussi qu’ils doivent renoncer à cela pour être simplement les exécutants fidèles du monde dit néolibéral, financier.
C’est la raison pour laquelle je préfère pour ma part dire que la question du nombre des avocats pose bien une difficulté car dans ce monde monétisé, l’avocat matériellement fragilisé est un adversaire affaibli qui aura du mal à s’opposer, à se révolter.
Mais on comprend que, pour ceux qui estiment que l’avocat ne doit être qu’un facteur économique, alors cette croissance exponentielle est une chance.
Pour le marché.

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