Le nombre d’avocats a
augmenté de plus de 40 % en dix ans, induisant un débat sur la possibilité de
la profession d’absorber ce nombre exponentiel.
Dans l’incessant
déroulé des messages Twitter, celui d’un ancien président de l’ACE suggérant qu’il
n’y avait pas trop d’avocats, mais inadaptation de ceux-ci au marché.
Pas les marchés des
villages où la ménagère de plus de 50 ans s’en va acquérir ses choux et
poireaux.
Mais l’adaptation à
la réalité du monde économique.
Cela pose de
multiples questions.
D’abord le taux d’augmentation
est effectivement le même sur tout le territoire, semble-t-il.
Si l’on peut
considérer un besoin de droit de la part des entreprises, la situation est
différente selon les bassins d’activité.
Paris la toute belle
n’est pas Marseille.
Les nouveaux marchés
du droit que l’on peut imaginer seront peut-être réalité d’ici 10 ou 20 ans,
mais en attendant, c’est la problématique des fins de mois qui est présente.
Car dans les
territoires sinistrés, c’est de cela qu’il peut s’agir.
Mais, extrapolons.
Le rôle de l’avocat
était, autrefois, de dire la parole de celui qui s’opposait et sa robe issue du
clergé, ce rapport distancié à l’honoraire, autrefois banni, participait d’un
temps où régnait la sacralité.
L’Avocat n’écrivait
pas, il parlait.
Cela reste un peu
dans les gènes de l’avocat judiciaire, dans sa façon de penser.
Mais le droit est
aussi devenu une marchandise et l’Avocat dans le monde de l’entreprise (bientôt
en) n’est pas tant celui qui s’oppose que celui qui facilite les décisions
prises.
C’est un processus
intellectuellement différent.
Quelque part la
profession d’avocat est devenue un peu schizophrène.
Mais alors les marchés ?
On sait que l’entreprise
aujourd’hui ne crée pas des objets dont le consommateur a besoin mais crée des
objets dont elle va convaincre le
consommateur qu’il en a besoin, même si ce n’est nullement le cas.
A-t-on besoin du
dernier iPhone ?
Là où l’on parlait
autrefois du verbe créateur, c’est aujourd’hui l’entreprise créatrice qui
règne.
Si l’on prend l’industrie
pharmaceutique, on doit constater que celle-ci va jusqu’à créer des maladies.
Le taux de
cholestérol qu’il ne faut pas dépasser est la conséquence de la création de
médicaments, pas la cause.
Il en est ainsi pour
toutes sortes de nouvelles maladies.
Peut-être de la
fameuse hyperactivité des enfants ; quel médicament ?
Le consommateur est
malade parce que l’entreprise l’a décidé pour vendre son médicament.
Ne voit-on pas
aujourd’hui Google s’intéresser à la santé et vouloir créer le diagnostic
prédictif ?
Ça fait peur !
Alors l’avocat.
Il est permis de se
poser la question de savoir s’il n’en est pas de même pour la profession d’avocat.
Bien sûr il y a les
nécessités de l’évolution économique qui contraignent cette vieille dame que la
profession à se bouger un peu les fesses dans son comportement ; c’est vrai.
Mais quel avocat veut
le marché ?
On devine qu’il ne
veut pas l’avocat d’antan, celui qui s’oppose.
Il veut celui qui met
en forme ce qui a été décidé, l’exécutant.
Il peut vouloir aussi
un avocat dévalorisé qui peut alors être utilisé, par exemple pour l’aide
juridictionnelle au sein de structures dédiées qui pourraient satisfaire des
intérêts financiers puissants.
Quand on dit que les
avocats ne sont pas adaptés au marché, eux dont la culture restent marquée de
la tradition sacramentelle, c’est-à-dire d’un rôle de la profession allant
au-delà du matériel et de la marchandisation ; cela peut vouloir dire aussi qu’ils
doivent renoncer à cela pour être simplement les exécutants fidèles du monde dit
néolibéral, financier.
C’est la raison pour
laquelle je préfère pour ma part dire que la question du nombre des avocats
pose bien une difficulté car dans ce monde monétisé, l’avocat matériellement
fragilisé est un adversaire affaibli qui aura du mal à s’opposer, à se
révolter.
Mais on comprend que,
pour ceux qui estiment que l’avocat ne doit être qu’un facteur économique,
alors cette croissance exponentielle est une chance.
Pour le marché.
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