"Le mot
Philosophie, pris dans son sens le plus vulgaire, enferme
l'essentiel de la notion. C'est aux yeux de chacun, une évaluation
exacte des biens et des maux ayant pour effet de régler les désirs,
les ambitions, les craintes et les regrets. Cette évaluation
enferme une connaissance des choses, par exemple s'il s'agit de
vaincre une superstition ridicule ou un vain présage ; elle
enferme aussi une connaissance des passions elles-mêmes et un art
de les modérer. Il ne manque rien à cette esquisse de la
connaissance philosophique. L'on voit qu'elle vise toujours à la
doctrine éthique, ou morale, et aussi qu'elle se fonde sur le
jugement de chacun, sans autre secours que les conseils des sages.
Cela n'enferme pas que le philosophe sache beaucoup, car un juste
sentiment des difficultés et le recensement exact de ce que nous
ignorons peut-être un moyen de sagesse ; mais cela enferme que le
philosophe sache bien ce qu'il sait, et par son propre effort.
Toute sa force est dans un ferme jugement, contre la mort, contre
la maladie, contre un rêve, contre une déception. Cette notion
de la philosophie est familière à tous et elle suffit"
Alain, 81 chapitres sur l’esprit et les passions, Gallimard, La Pléiade, p. 1072.
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