Parfois, voyez-vous, dans ces salles d’audiences
modernes, dans ces tribunaux devenus fonctionnels, ma robe noire d’avocat me
paraît d’un autre temps qui fait appel à la notion de symbolisme dans un temps
désacralisé, oublieux des traditions et de l’histoire.
Je me sens musée.
Je sais bien, auxiliaire de justice, que la
première de mes préoccupations devrait être de servir le droit, alors que la
première de mes préoccupations est d’assurer le bon fonctionnement du cabinet
et, dès lors, son adaptation aux évolutions techniques et économiques pour
offrir le meilleur service avec la meilleur des rentabilités
Je ne souhaite pas à mes amis notaires et huissiers d’être dynamités comme la profession
d’avocat l’a été, ouverte à tous les vents, sans régulation aucune, générant
par la même paupérisation et insécurité juridique pour le consommateur, oui, je
dis le consommateur.
Mais, en même temps, je me rappelle du temps des avoués,
au moins dans le sud, où le travail était fait par l’avocat et où la méthode de
rémunération conduisait souvent l’avoué à percevoir, tarif oblige, bien plus que l’avocat pour, quelque part, mettre
simplement en forme des actes transmis.
Double peine pour le consommateur.
J’ai regretté la disparition des avouée, pensant
simplement que la notion de charges et de tarifs est indéfendable, à l’heure du
néolibéralisme triomphant et qu’il vaut mieux savoir évoluer, avant que de
mourir.
Personne ne discutera au notaire sa compétence,
comme personne ne la jugera forcément exceptionnelle, mais protégée en revanche
par un statut ancien, le retirant quelque part un peu du monde de la
concurrence et lui permettant, il faut le dire parfois, un comportement d’un
autre temps, pontife de l’acte authentique au mode de rémunération parfois un
peu opaque…
Rien ne justifie vraiment, sérieusement, que les
notaires aient le monopole des ventes immobilières.
Ils les font bien, oui, comme d’autres peuvent le
faire et on oublie souvent que la sécurité vient de la publicité foncière qui
veille au grain.
Comme on oublie, d’ailleurs, que l’acte
authentique n’a pas l’autorité de la chose jugée et que, finalement il est
probablement désuet, en fait.
Je sais le métier de chien qu’ont les huissiers de
justice comme je sais qu’une convocation en justice par huissier est sûrement
plus sécurisée que les lettres recommandées, ou demain les SMS.
Mais en même temps pourquoi ne pas dire que
certains PV de recherche apparaissent un peu étonnants et que tout dépend du
personnel.
La sécurité n’est pas un principe lié à un statut !
Et pourquoi ne pas dire aussi que, là encore le
tarif est désuet et que l’augmentation, il y a quelque temps, du fameux article
10, pourcentage gras encaissé sur les sommes recouvrées, était probablement l’augmentation
de trop.
C’est vrai que parfois le niveau de revenus de ces
professions peut étonner, comme le fait que souvent la cession des études
notariales se fait en tenant plus compte des possibilités financières que de la
qualité juridique, pauvre consommateur.
Mais ce sont les aléas humains, finalement.
Il y a quelque ignominie, pour ce pouvoir, à vomir les professions réglementées en oubliant
de s’attaquer à la réforme de l’État, à la haute fonction publique qui est
peut-être aujourd’hui la plus indécente des rentes.
Celle-là, aussi, que se trouve le conservatisme
qui ruine le pays.
Un temps se meurt, né d’une France rurale et
royale ; un temps nait, celui du virtuel, du cloud, du consommateur roi et
probablement des puissances de l’argent reines.
Regardez, même l’État-nation est menacé quand des
régions, d’Espagne ou du Royaume-Uni, demandent leur indépendance.
La vérité est qu’aujourd’hui avocats, notaires,
huissiers et autres sont contraints de gérer, tout bêtement, comme toute autre
profession.
Et la vérité est également que certains monopoles
ne se justifient plus par la nécessité économique, mais, en revanche sont
contraires aux évolutions souhaitées par l’Europe.
On ne peut, dit-on, servir à la fois Dieu et Mammon,
c’est-à-dire le sacré et l’argent.
Les professions sont des unités économiques dans
un monde où les symboles, les statuts, les monopoles, les tarifs, l’arrogance
même du comportement sont mis à mal.
C'est comme ça!
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