Pages

lundi 5 mai 2014

TAFTA, pas d'accord à tout prix



 

 Un des dossiers prioritaires de la prochaine législature sera la négociation du Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement. En tant que libéral, je ne peux que me féliciter des efforts entrepris pour renforcer les liens économiques de part et d'autre de l'Atlantique. L'Europe et les Etats-Unis sont les pionniers du commerce international et ce sont les deux plus gros ensembles économiques du monde. La logique de cet accord est donc évidente. Des études indépendantes tablent d'ailleurs qu'un large et ambitieux accord pourrait générer 120 milliards d'euros chaque année de chiffres d'affaires supplémentaires pour l'UE, en particulier grâce à l'ouverture aux PME européennes du marché américain, jusque-là chasse-gardée des multinationales.
Cela étant dit, je ne suis pas prêt à un accord à tout prix. Le Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement devra ainsi protéger le consommateur européen, préserver les normes exigeantes de l'UE, notamment en matière agro-alimentaire et d'environnement et respecter l'ordre juridique de l'UE et de ses Etats membres. Rendre compatible les marchés américain et européen ne doit pas déboucher sur la dérégulation. Un Traité international de cette ampleur devra en effet être ratifié par les Parlements nationaux et européen et si les inquiétudes des opinions publiques sur toute une série de sujets ne sont pas apaisées, j'augure mal de l'issue de ce processus, y compris au Parlement européen.
La prochaine Commission devra en avoir bien conscience avant de s'engager dans certaines voies qui pourraient se révéler finalement sans issue. La clef du succès réside donc dans une négociation la plus ouverte et la plus transparente possible. A cet égard je me félicite de la consultation publique ouverte par la Commission sortante sur l'opportunité d'assortir le Partenariat transatlantique de tribunaux d'arbitrage.
Je n'exclus pas à priori l'inclusion de mécanismes de protection des investissements dans le futur. Des tribunaux d'arbitrage sont prévus dans la plupart des Traités de libre-échange que conclut l'UE avec des pays tiers. Mais je ne suis guère convaincu de la valeur ajoutée d'un tel mécanisme controversé dans le cas d'espèce. Les deux systèmes juridiques, de part et d'autre de l'Atlantique, reposent sur un Etat de droit ancien, solide, prévisible, où toutes les procédures d'appel existent déjà. En tout état de cause, si les investissements doivent être évidemment protégés, ce ne peut pas être au prix d'une remise en cause du droit souverain de l'UE et de ses Etats membres à légiférer de manière autonome.
La révolution industrielle du XXIe siècle sera sans doute celle de l'économie digitale. Or force est de reconnaître que les principaux acteurs du marché numérique sont aujourd'hui américains. Ce ne serait pas un problème si cette nouvelle économie ne posait que des problèmes commerciaux. Mais l'économie digitale soulève aussi des questions en matière de protection des données et les géants de l'Internet américain profitent par ailleurs du maquis fiscal européen. Dans la mesure où je plaide pour une législation renforcée sur la vie privée sur Internet et pour une politique fiscale commune, je ne suis pas prêt à voir contester mes choix politiques par un tribunal d'arbitrage.

Ancien Premier ministre belge, Guy Verhofstadt est président de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe (ADLE) et tête de liste des libéraux aux prochaines élections européennes.


Non au tribunal d'arbitrage ! Je suis d'accord avec le Monsieur!

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire